Nuits
Ivresse de l'homme gris, blafard - taulard en fuite, échappé du mitard
Vers une rive aveuglée il chemine dans le noir - soir sans lune
Rien ne vibre dans le cœur lourd de suie et de désespoir - l'enclume est en vue
Et là une danseuse égarée franchit l'abîme avec grâce - ses chaussons blancs tâchés
Serait-ce sa dernière heure de désespoir ? Rencontre née des éclats de hasard... Loupé.
Trop tard.
Sur le trottoir en bitume, le sang flamboie de la vie perdue du taulard.
Il s'est tranché la gorge dans la nuit trop noire.
Elle lui essuie le front gracieusement. À quoi bon ?
***
Sur le ciel rouge et noir du crépuscule
Des silhouettes défilent nombreuses
Pas triste et lourd
Quel est ce deuil mystérieux qui nous abat ?
Nulle voix ne souffle la vérité sur ce désolant paysage
Nul ne dit la raison de tant de désolation
Quelqu'un le sait-il ?
Qui le murmure ?
Un souffle imperceptible emplit le silence d'un pleur sans pareil
Un souffle malheureux murmure son tourment
Je ne sais où je suis ni où je vais assurément
Je ne sais qui le sait
J'ai perdu la parole, la vue, mes idoles
J'avance dans le noir absolu machinalement
Tête baissée
Condamné
Résigné
J'aspire à la fin du chemin caillouteux et blessant
Mes pieds saignent
Larmes de mes yeux asséchés
À quoi bon pleurer ?
L'abîme est grand ouvert
Sautons